Histoire de peu n°4 - La fac de quartier

Publié le par Raffi Duymedjian

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Imaginez-vous dans un quartier, l’un des plus denses et dynamiques de Tokyo. Appuyez-vous sur des habitants qui le connaissent comme leur poche. Demandez-leur de chercher des espaces désireux d’accueillir un cours : café, puvs, gymnase, ou autres. Trouvez des personnes volontaires et désireuses d’enseigner leur passion - calligraphie ou aromathérapie par exemple. Trouvez-en d’autres avides d’apprendre des domaines infiniment variés. Utilisez les médias locaux, le bouche-à-oreille ou des sites communautaires pour vous faire connaître et informer des nouveaux « cours ». Vous obtenez l’Université Shibuya, une institution qui ne délivre aucun diplôme, mais dont les frais d’inscription sont gratuits. 2 permanents, une vingtaine de collaborateurs à temps partiel (rémunérés grâce à une aide de la Mairie et des sponsors privés)  ainsi qu’une centaine de bénévoles ont jusqu’à présent réussis à faire que  « 293 personnes, Japonais comme étrangers, ont déjà donné un cours à l'université, qui a attiré plus de 12 000 étudiants » (Le Monde, Le Japon à l'heure du savoir partagé, édition du 02.05.09).


Nous appellerons ce petit miracle d’astuce une stratégie bricolante, c’est-à-dire non pas un moment bricoleur se manifestant, dans un système productif, par le geste, ponctuel, de « faire avec les moyens du bord », mais une organisation toute entière axée sur une logique du « faire avec ».


Cette logique, dans cet exemple si fantastiquement illustré, s’exprime ici par l’importance de la proximité (« enseignants »,  « étudiants », locaux, medias et sources de financement d’un seul et même quartier), par l’ouverture, la disponibilité et la tolérance – aux thèmes, aux « professeurs  improvisés », aux locaux détournés de leur usage premier. On y retrouve bien les caractéristiques principales d’un bricolage – usage d’un stock (personnes, savoirs, lieux, etc.), assemblage d’individus, de savoirs, de lieux divers, détournement – des profs qui n’en sont pas « officiellement » et de locaux qui ne sont pas salles de cours. Le tout "tient suffisamment la route" pour que le modèle ait séduit au point que « l'université fait d'ailleurs des émules. Après Kyoto, Sapporo et Nagoya y travaillent. Et plusieurs villes d'une quinzaine de pays d'Asie et d'Europe s'y intéressent. »


Alors, impressionné ?

Publié dans Bricolage

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